Shawn Layden, ancien directeur de PlayStation, a récemment partagé ses réflexions sur la stratégie multiplateforme de Microsoft, la comparant à celle de Sega. Il a souligné que, bien que cette approche puisse offrir des avantages similaires à ceux connus par Sega, elle pourrait également rendre la création d’un sentiment d’urgence (FOMO, ou fear of missing out) pour les consoles Xbox beaucoup plus difficile.
Layden, qui a occupé le poste de président du groupe mondial des studios de Sony jusqu’à son départ en 2019, a fait une apparition sur la chaîne YouTube Kiwi Talkz. Lors de cet entretien, il a abordé plusieurs sujets, dont l’initiative récente de Microsoft visant à sortir ses grands jeux sur la PlayStation 5.
En réponse à une question sur cette nouvelle stratégie, Layden a déclaré : “La multiplateforme est une stratégie, surtout dans un monde où le coût du développement augmente de manière dramatique.”
Il a ensuite ajouté : “Quelle est l’impact sur leur marque ? Cela complique la conversation autour du FOMO que vous essayez de créer en attirant tout le monde sur votre plateforme en disant : ‘Si vous n’êtes pas ici, vous manquez quelque chose.’ Mais si le jeu est disponible sur toutes les plateformes, c’est une des tactiques marketing que vous ne pouvez pas utiliser.”
De nombreux anciens jeux exclusifs Xbox ont récemment été annoncés sur PS5, le dernier en date étant Forza Horizon 5 ainsi qu’Indiana Jones et le Grand Cercle. Phil Spencer, le responsable de Microsoft, a mentionné qu’il n’y avait “aucune ligne rouge” concernant ce qui pourrait venir après.
“Nous l’avons déjà vu par le passé. J’étais dans le secteur quand Sega a commencé à porter ses titres Dreamcast sur PS2. Avec le temps, Sega est devenu une entreprise de logiciels uniquement, et cela a constitué une grande transformation dans ce sens,” a poursuivi Layden. “Il y a donc une certaine précedent historique.”
Sega a connu une fin difficile avec sa dernière console, la Dreamcast, qui a été lancée en 1998 et arrêtée en mars 2001. Par la suite, Sega a commencé à publier des titres sur d’autres plateformes, avec un succès variable. Toutefois, au cours de la dernière décennie, la société a su s’appuyer sur le développeur Atlus pour créer plusieurs des JRPG les mieux notés de tous les temps.
Cette évolution coïncide avec une explosion de popularité pour sa série Like A Dragon (anciennement Yakuza), ainsi qu’un succès cross-média avec des franchises telles que Sonic the Hedgehog.
Plus tôt cette semaine, un autre ancien dirigeant de Sony a affirmé qu’il n’y avait “aucune victime” dans l’ère multiplateforme de Xbox.
L’ancien vice-président de PlayStation a déclaré que Xbox est désormais “un fournisseur de divertissement” et non “juste un producteur et distributeur de disques”.
“Donc, si nous réfléchissons à cela, l’analogie pourrait être que PlayStation est HBO, Microsoft est Netflix, et Nintendo est Disney. Leur travail consiste à proposer un divertissement incroyablement interactif et engageant à un maximum de personnes possible.”
Cette analyse de l’ancien dirigeant de PlayStation met en lumière les défis auxquels sont confrontés les acteurs du secteur des jeux vidéo aujourd’hui. La concurrence entre géants comme Microsoft, Sony et Nintendo est plus vive que jamais, et chaque entreprise doit naviguer dans des eaux incertaines alors que l’industrie évolue rapidement avec l’avènement des nouvelles technologies.
L’une des principales préoccupations pour Microsoft dans cette stratégie multiplateforme est l’identité de la marque Xbox. En proposant ses jeux vedettes sur plusieurs plateformes, y compris celles de ses concurrents, Microsoft risque de diluer la valeur perçue de sa propre console. Les joueurs pourraient y voir une raison de ne pas investir dans la dernière Xbox si leurs jeux préférés sont disponibles sur d’autres systèmes. La quête du FOMO est essentielle pour toute entreprise technologique : transformer l’incertitude en désir fort, créer cette envie irrésistible qui pousse à l’achat.
En France, où le marché du jeu vidéo est en pleine expansion, cette dynamique est particulièrement intéressante. Les joueurs français, tout comme leurs homologues internationaux, sont devenus de plus en plus exigeants. Ils recherchent des expériences de jeu uniques et captivantes. De ce fait, les entreprises doivent rivaliser non seulement sur les titres de jeux, mais aussi sur l’ensemble de l’écosystème qu’elles offrent.
Microsoft, avec son éventail de services comme Xbox Game Pass, souligne son approche centrée sur le consommateur, cherchant à offrir un accès abordable et illimité à un vaste catalogue de jeux. À l’inverse, Sony semble se concentrer sur l’exclusivité, cherchant à tirer le meilleur parti de ses studios internes pour créer des expériences que l’on ne peut vivre que sur PlayStation. Cette confrontation entre la philosophie du tout-multiplateforme et celle de l’exclusivité est au cœur des choix que les consommateurs doivent faire en matière de plateforme, et ce même en France où une bonne partie des joueurs penche traditionnellement vers PlayStation.
Layden a fait référence à l’histoire de Sega, une comparaison pertinente. Sega a connu une ère avec la Dreamcast, une console innovante qui a été précocement stoppée à cause de la concurrence acharnée de Sony et de sa PlayStation. Bien que Sega ait ensuite dû pivoter vers le développement de logiciels, l’entreprise a réussi à se repositionner et à sortir des jeux de grande qualité, notamment avec des franchises emblématiques. Cela montre que l’adaptabilité est essentielle dans le secteur du jeu vidéo.
Pour les entreprises comme Microsoft, l’enjeu réside désormais dans leur capacité à rester pertinentes. En élargissant leur portée sur plusieurs plateformes, ils peuvent capter un public plus vaste, mais cela doit être équilibré avec l’importance de maintenir une base de joueurs fidèles sur leur propre matériel. C’est une danse délicate que les géants de l’industrie doivent réaliser – soutenir l’innovation tout en cultivant un écosystème solide et attractif.
Au-delà des chiffres de ventes ou des exclusivités, les joueurs cherchent avant tout des expériences mémorables et des récits engageants. Les jeux ne doivent pas seulement être de simples produits, mais des univers où les joueurs peuvent s’investir émotionnellement. Cette dimension humaine du jeu vidéo est ce qui continuera d’attirer les joueurs, quelle que soit la plateforme.
À l’heure actuelle, l’industrie des jeux vidéo en France et dans le monde entier est à un carrefour. Les changements dans les modèles économiques, les attentes des consommateurs et l’évolution des technologies impliquent que les entreprises doivent repenser continuellement leurs stratégies. Les propos de Shawn Layden ne servent pas seulement d’analyse d’un cas particulier, mais ils ouvrent la voie à une réflexion plus large sur la direction que prendra cette industrie au cours des prochaines années.
Pour conclure, la situation actuelle de Microsoft face à la stratégie multiplateforme versus les consoles exclusives soulève des questions fondamentales pour l’avenir des jeux vidéo. Les choix réalisés aujourd’hui pourraient bien façonner le paysage du jeu pour les générations futures. Dans un marché aussi dynamique, les entreprises doivent non seulement s’adapter aux tendances actuelles, mais aussi anticiper les changements à venir pour rester compétitives. Les joueurs, quant à eux, continueront de naviguer dans ces eaux, faisant leurs choix basés sur ce qui leur apportera la meilleure expérience de jeu.